L’arrivée récente, au Musée des Beaux-Arts de Rennes, d’une réplique en petit format de la statue de Louis XIV qui s’érigeait originellement de 1726 à 1794 sur la place du Parlement de Bretagne à Rennes, provoque depuis plusieurs jours la colère équitablement répartie de l’ensemble des organisations (euro)nationalistes bretonnes qui y voient le « retour d’un tyran qui martyrisa la Bretagne » et donc une « véritable insulte faite aux bretons ».
La référence, par ailleurs légitime, est ici celle de la révolte du papier timbré qui agita, entre autre, le duché de Bretagne d’avril à septembre 1675 et qui se conclura par une répression féroce de la part de Louis XIV et de ses troupes (notamment pour partie venues d’Allemagne), par la torture, l’écartèlement et/ou la pendaison de nombreux meneurs et partisans de cette révolte et des « Code paysans » qui en émergèrent, véritables écrits précurseurs des cahiers de doléances de la Révolution française qui éclatera plus de cent ans plus tard.
Pour autant, 350 ans plus tard, la figure de Louis XIV sous forme d’une réplique d’une statue disparue et désormais exposée en musée est elle concrètement une insulte de « Paris » et du « pouvoir central » envers la Bretagne ?
N’est il simplement pas là question de patrimoine national ?
Bien entendu, il ne faut pas être naïf, surtout ces derniers jours où la monarchie britannique fait parler d’elle, sur la propension de quelques barons locaux du PS ou des LR, véritables aristocrates politiques, à aduler le régime monarchique constitutionnel d’outre-Manche, ne cessant de sous-entendre l’erreur qu’aurait été la décapitation de Louis XVI et oubliant au passage qu’ils sont des élus de la RÉPUBLIQUE.
Par ailleurs, ces mêmes pseudo « républicains », à Rennes comme à Paris, ne cessent de s’attaquer à l’idéal républicain et à ce qu’il en reste en détruisant les services publics, en maltraitant la laïcité, en dépeçant toujours plus notre pays (de la Corse à la Bretagne en passant par l’Alsace) et le caractère indivisible de notre République pour mieux le livrer aux appétits capitalistes et impériaux de l’Union européenne, cette prison des peuples, de l’euro toujours plus austéritaire pour les travailleurs, et de l’OTAN belliciste qui cherche la guerre mondiale aux portes de la Fédération de Russie et en Mer de Chine.
Il n’est donc pas question de rejoindre l’émoi hypocrite de Nathalie Appéré, maire de Rennes, ou d’autres gogos bourgeois qui, quand leurs privilèges trembleront à la vue de gilets jaunes et rouges unis, s’empresseront de tenter de faire revivre l’esprit du duc de Chaulnes contre celui des Codes paysans.
Mais il ne peut être question non plus de rejoindre les hurlements de loups des (euro)nationalistes bretons, ces fidèles alliés inconscients mais objectifs de ceux qui aujourd’hui « règnent à Paris » (la Macronie fait tout pour dépecer la France et donner plus de largesse aux « euro-régions » dans le cadre du « saut fédéral européen » que Macron lui-même nomme « souveraineté européenne »), pour qui tout est prétexte à théoriser un « sang breton » qui s’opposerait de fait au principe républicain de citoyenneté et pour qui tout est une insulte à ce « sang » dont l’histoire n’aurait rien à voir, mais alors rien à voir, avec celle de ce qui forme aujourd’hui la nation française républicaine, dont nous héritons, avec le meilleur et le pire de l’histoire de France.
Au sujet de la manière de traiter la question des statues en France, nous vous renvoyons, chers lecteurs, à l’article suivant paru sur Initiative-Communiste.fr, le site internet du PRCF : https://www.initiative-communiste.fr/articles/culture-debats/a-propos-des-statues-toussaint-maximilien-et-dulcie/
Cette réplique de statue doit donc être vue pour ce qu’elle est compte tenu de ce qu'elle fait dans un musée des beaux-arts et doit permettre d’expliquer aujourd’hui une partie terrible de l’histoire de France par l’histoire même de la Bretagne.
Plutôt que de s’attaquer aux statues, expliquons les et débattons nationalement de leur pertinence. Ne laissons pas le nationalisme diviser le peuple de France.
Et après tout, chers nationalistes bretons, quitte à s’opposer à la statue d’un monarque, allons jusqu’au bout et exigeons que la ville de Rennes se dote d’une Avenue Robespierre, d’une rue du club des bretons (qui se transformera en club des jacobins !), d’une place Marcel Cachin, d’une statue pour Joséphine Pencallé ou pour Charles Tillon (co-dirigeants de la grève des pen-sardinières, et, pour ce dernier, dirigeant de la grève des équipages - bretons - des navires français envoyés en Mer noire contre la Révolution d'Octobre, puis dirigeant n°1 des FTP, puis ministre en 1945), ou pour Eugène Kerbaul qui fut un dirigeant des Jeunesse communistes en Bretagne, puis un dirigeant des FTPF dans le Nord et ancien membre jusqu’à sa disparition du comité d'honneur du PRCF. Et même pourquoi pas d’un monument élevant les ouvriers-forgeron de Rennes qui fondirent cette statue de Louis XIV afin d’en faire des canons pour la défense de la patrie révolutionnaire, une et indivisible !
Chiche !